À quelques mois des élections municipales, Jean-Roch Gaillet, directeur général de l'Institut français du cheval et de l'équitation, Frédéric Bouix, président de la Fédération Française d’Équitation, Emmanuel Feltesse, président du Comité Régional d’Équitation d’Île-de-France ainsi que Danièle Gaillard, présidente du Comité Départemental d’Équitation de Paris ont convié les élus franciliens à un temps d’échanges autour des enjeux de la pratique équestre et des défis rencontrés par les poney-clubs et centres équestres implantés en milieu urbain, mercredi 26 novembre à la Garde Républicaine (75).
Une centaine d’acteurs publics - députés et sénateurs, notamment les Présidents des groupes d’études Cheval de l’Assemblée nationale et du Sénat ainsi que les élus locaux d’Île-de-France, - accompagnés de dirigeants de clubs, ont été accueillis à la Garde Républicaine, quartier des Célestins au cœur de Paris, par le lieutenant-colonel Vincent Marescaux, commandant en second du régiment de cavalerie : “notre site accueille plus de 150 chevaux. Le régiment tâche de s’accorder à l’évolution des pratiques et a fait évoluer l’ensemble de ses infrastructures pour garantir aux chevaux des conditions optimales et mener à bien les missions de sécurité publique.” La matinée, consacrée aux perspectives de l’équitation en milieu urbain, a été organisée à l’initiative de Danièle Gaillard, présidente du Comité Départemental d’Équitation de Paris.
Les élus ont échangé autour du rôle du cheval comme véritable partenaire pour la mise en œuvre des politiques publiques locales et des besoins d’accompagnement des établissements équestres urbains afin de moderniser leurs infrastructures et répondre aux enjeux croissants de bien-être animal.
Ils ont dit
Jean-Roch Gaillet, directeur général de l’Institut français du cheval et de l’équitation
“Nous sommes très heureux de vous accueillir pour cet événement tourné vers l'avenir de l'équitation en milieu urbain. L’activité de la filière Cheval est très diversifiée : plus de 30 disciplines sportives différentes, des activités de tourisme et de loisirs équestres, de thérapie et d’accompagnement de l’humain avec les équidés, sans compter l’élevage, l’agriculture, les hippodromes ou encore la sécurité. Il est important de rappeler que la filière équine représente plus de 6 milliards d’euros de chiffre d’affaires et que l’activité du cheval comptabilise près de 120 000 emplois. C’est au service de l’ensemble de cette filière que travaille l’IFCE. Les iéchanges qui sont proposés aujourd’hui visent à partager ce dialogue entre sciences et pratiques et seront, j’en suis certain, à la fois stimulants et enrichissants”.
Frédéric Bouix, président de la Fédération Française d’Équitation
“La FFE compte plus de 625 000 licenciés, faisant de l’équitation le troisième sport le plus pratiqué en France. Près de 12% de nos licenciés au niveau national pratiquent en zone urbaine dense, un chiffre qui atteint 43% en Île-de-France. L’équitation est bien sûr un sport, mais elle va au-delà. C’est une activité éducative, de loisir, au service de la santé et du bien-être. Si nous ne maintenons pas un certain nombre d’activités équestres urbaines, les chevaux disparaîtront des villes et de nombreux concitoyens n’auront plus l’opportunité d’être à leur contact. Aujourd’hui, les activités équestres représentent une véritable opportunité pour les élus dans la mise en œuvre de nombreuses politiques publiques locales. La Fédération, aux côtés des dirigeants de clubs, est très attentive à l’ensemble des sujets qui seront abordés et met tout en œuvre pour assurer aux équidés des conditions de vie et de santé optimales en milieu urbain”.
Emmanuel Feltesse, président du Comité Régional d’Équitation d'Île-de-France
“Les entreprises équestres sont, pour la majorité, des entreprises agricoles et représentent des coûts d’entretien très faibles pour les collectivités. En équitation, l’usager paye l’entièreté de sa pratique, contrairement à d’autres sports où l’entretien des équipements sportifs (stades, gymnases) est financé par les collectivités territoriales. Pour autant, les activités équestres sont en lien direct avec les politiques publiques locales notamment dans les domaines de l’éducation et du handicap. Elles possèdent une spécificité unique : mettre en contact l’humain avec le cheval. Je suis ravi de vous voir réunis pour ce petit-déjeuner afin d’échanger et mieux comprendre l’intérêt de faire perdurer ce lien de proximité entre les populations urbaines et les poneys et chevaux”.
Danièle Gaillard, présidente du CDE 75, a rappelé le rôle du Comité Départemental d’Équitation de Paris, qui compte près de 9000 licenciés et 18 regroupements équestres, ainsi que les défis rencontrés par ces structures qui dépendent majoritairement d’une concession de service public et de l’accord de la collectivité pour exercer leurs activités.
Les bienfaits du partenaire Cheval au service des territoires
Les activités équestres constituent un levier précieux pour la mise en œuvre de nombreuses politiques publiques liées à l’éducation, à la santé et à l’inclusion. Dernières "fermes des villes", les établissements équestres offrent aux habitants des zones urbaines, un cadre privilégié pour se ressourcer, se reconnecter à la nature et créer du lien avec un être vivant.
Alors que la santé mentale a été désignée Grande Cause nationale 2025, la médiation équine apparaît comme un accompagnement particulièrement pertinent pour faire face aux enjeux de santé publique de notre société moderne. Cette démarche, en plein essor, s'appuie sur une interaction directe entre l'humain et le cheval, encadrée par un professionnel spécifiquement formé. Carole Yvon-Galloux, chargée de missions Cheval & Diversité à la FFE, a ainsi présenté aux élus les cinq volets de la médiation équine : handicap/inclusion, soin/équithérapie et hippothérapie, accompagnement psycho-social, equicoaching, sport santé bien-être. Autour de chacun des domaines, des exemples concrets ont notamment valorisé la plus-value du Cheval comme partenaire unique dans l'ensemble des parcours de vie.
Les unités localisées pour l’inclusion scolaire (ULIS), qui accueillent des élèves en situation de handicap, s’appuient de plus en plus sur des projets pédagogiques élaborés autour du cheval. Les séances de médiation équine constituent alors une vraie source d’épanouissement et d’évolution pour les élèves. Dans le cadre du programme Cheval & Altérité, soutenu par le fonds de dotation de la FFE EquiAction, près de 2500 enfants ont été accompagnés sur l’ensemble du territoire.
Orianne Valais, ingénieure de projets et développement à l’IFCE, a présenté les résultats d’une étude menée sur des élèves de classes ULIS, avant et après une pratique hebdomadaire de médiation équine, permettant d’objectiver ses bienfaits : “Les tests ont révélé une amélioration de l'estime de soi, une diminution du retrait social et une meilleure adaptabilité de l’enfant à son environnement. (Bonneau J.2024). Une seconde étude menée auprès de jeunes présentant des difficultés psychologiques a montré que leur capacité d’apprentissage s’était améliorée au contact des chevaux. Le travail à pied leur a notamment permis de développer une communication non violente et d’expérimenter de nouvelles stratégies d’interaction sans colère ni peur.” (Peignier S. et al. 2022)
À l’issue de cette première partie, Samia Badat-Karam, première adjointe au maire du XVIᵉ arrondissement de Paris, a témoigné de son soutien en faveur de la pratique de l’équitation en milieu urbain : “Avec mes collègues, nous intervenons régulièrement au Conseil de Paris pour défendre la place du cheval dans la capitale. Les témoignages que nous avons entendus sont éloquents. En tant qu’élus, nous sommes en capacité d’aider cette filière : en soutenant le renouvellement des concessions, en rappelant régulièrement les bienfaits de l’équitation et en développant la pratique à poney dans les écoles.”
Des acteurs engagés pour le bien-être animal
Dans un contexte où les attentes liées au bien-être des animaux sont croissantes, garantir celui des équidés est une priorité absolue pour les dirigeants d’établissements équestres qui sont accompagnés en ce sens par la FFE, ses organes déconcentrés et l'IFCE en tant qu'institut technique national au service de la filière.
Orianne Valais a rappelé aux élus la définition du bien-être animal : “un état mental et physique positif lié à la satisfaction de ses besoins physiologiques et comportementaux, ainsi que de ses attentes. Cet état varie en fonction de la perception de la situation par l'animal”. Puis, elle a présenté le protocole Cheval bien-être, réalisé en partenariat avec l’INRAE et l’université de Milan. Ce dernier, financé par le Conseil scientifique de la filière équine, permet d’évaluer le bien-être des chevaux à travers une trentaine d’indicateurs validés scientifiquement, intégrés dans une application gratuite et simple d'utilisation.
Ce protocole met l’accent sur les quatre besoins fondamentaux du cheval à savoir :
Déborah Bardou, éthologue et chargée de missions bien-être animal à la FFE, a ensuite présenté les nombreuses actions menées par la Fédération pour promouvoir le bien-être animal et faire évoluer les pratiques : “Chaque acteur de la filière équestre a un rôle à jouer sur ce sujet et la FFE porte une responsabilité importante dans la prise en compte du bien-être animal. À cet effet, elle a notamment créé un comité de travail indépendant : la commission bien-être animal.”
À titre d’exemples, la FFE est signataire depuis 2016 de la Charte pour le bien-être équin, laquelle symbolise l’engagement des professionnels de la filière à promouvoir les mesures les plus pertinentes en termes de bien-être équin. Pour que les professionnels des poney-clubs et centres équestres s’approprie son contenu, et en application du Guide de bonnes pratiques validés par l'ANSES en 2021, la FFE a, en 2019, mis en place la “Mention bien-être animal” permettant d’identifier et de valoriser les établissements qui ont fait le choix de s’inscrire dans une démarche de progrès et allant au-delà des obligations légales en matière de bien-être équin.
Depuis 2025, de nouvelles formations dédiées au bien-être équin ont notamment été ouvertes afin de renforcer la formation continue des enseignants et dirigeants de club, par exemple sur la gestion du pâturage ou l’entraînement des équidés à coopérer lors des soins.
Des solutions concrètes pour améliorer le bien-être des poneys et chevaux en ville
Les poney-clubs et centres équestres urbains œuvrent dans un environnement contraint et sont confrontés à de nombreux défis pour faire évoluer leurs infrastructures. La situation est encore plus complexe lorsque les établissements dépendent d’une concession de service public et nécessitent l’accord de la collectivité pour toute modification.
Pourtant, des solutions simples, ne nécessitant pas de transformations lourdes, permettent d’ores et déjà d’améliorer le bien-être des équidés. L’objectif : favoriser le respect des besoins fondamentaux des chevaux en agissant sur les volets de l’alimentation, des interactions sociales et du mouvement.
Quelques exemples d’aménagements possibles ont été présentés aux élus franciliens :
Cédric Faveau, chargé de projets Gestion des équipements sportifs délégués du Conseil départemental de la Seine-Saint-Denis (93), a présenté aux élus les défis auxquels ses services ont été confrontés dans le cadre des travaux de modernisation du centre équestre départemental de la Courneuve : “Cet équipement a vocation à contribuer au développement de la politique sportive du département et à diversifier l’offre d’activités proposée à la population, notamment grâce à un golf et à un centre équestre départemental. Il s’agit d’une structure importante, disposant d’une centaine d’équidés pour la cavalerie d’instruction, et accueillant également du public scolaire — environ 800 élèves — ainsi qu’une partie des instituts médico-éducatifs. Le centre équestre départemental de La Courneuve est exploité en gestion déléguée par l’UCPA. La concession a été signée à nouveau en 2018 pour une durée de 25 ans avec un projet de réaménagement global du site. Le département a souhaité désenclaver les bâtiments afin que le poney-club soit davantage ouvert sur le parc, tout en respectant les impératifs de sécurité. Ce réaménagement a permis, entre les surfaces détruites et reconstruites, d’optimiser l’espace pour accueillir les équidés dans de meilleures conditions et répondre au mieux aux enjeux de bien-être animal.”
L'ensemble des échanges a suscité les témoignages des dirigeants d'établissements équestres franciliens mais aussi ceux d'élus locaux qui sont en prises avec des difficultés pour préserver les activités équestres dans les territoires.
En conclusion, Jean-Roch Gaillet, Frédéric Bouix et Emmanuel Feltesse ont tenu à mettre l’accent sur la qualité des échanges de la matinée et ont salué l’engagement des élus de différents horizons en faveur de la pratique équestre en milieu urbain. Ils ont rappelé l’importance du partage d’informations pour permettre à chacun de mieux appréhender les enjeux de la filière Cheval. Les travaux de la FFE et de l’IFCE se poursuivent en matière de bien-être animal et leurs résultats continueront à être diffusés régulièrement auprès des élus et du grand public.